Moratorier les dettes des entreprises, une étape incontournable pour éviter la cessation de paiement

Procédures collectives
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Une tribune de Nicolas Yakoubowitch, Associé chez Exponens.

La crise sanitaire avait mené la législation à accorder ces cinq derniers mois un répit aux entreprises, pour apprécier l'état de cessation de paiement et le déclarer. Depuis le 24 août, le délai habituel redevient la norme et les entreprises en difficulté ne pouvant honorer leurs factures ont désormais un délai très court (45 jours) pour se déclarer en cessation de paiement auprès du tribunal de commerce ou bien moratorier leurs dettes afin que celles-ci ne soient pas exigibles.

Deux ordonnances, celle du 27 mars 2020 et celle du 20 mai 2020, avaient adapté de manière temporaire le droit des entreprises en difficulté à la situation exceptionnelle qu’a vécue notre économie. Ce droit complexe recouvre des procédures bien diverses, allant de la prévention (conciliation ou mandat ad hoc) aux procédures collectives (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire).

Il est donc nécessaire d’être proactif dans la recherche de solutions, ceci afin d’éviter de rendre le passif de l’entreprise exigible et donc l’état de cessation des paiements (ECP) dont découlent les procédures judiciaires. Evidemment, plus le terme de cette échéance est derrière nous, moins l’entreprise a de chances de se redresser et plus le dirigeant risque de souffrir de sanctions personnelles.

Il faut désormais se positionner le plus en amont de cette échéance et recourir à la prévention comme moyen d’action. Les deux dispositifs législatifs existants sont le mandat ad hoc et la conciliation, qui diffèrent principalement sur la notion d’ECP. Dans le mandat ad hoc, l’entreprise ne doit pas être en ECP. Dans la seconde, l’ECP ne doit pas dépasser les 45 jours, ce délai constituant la principale ligne rouge à ne pas franchir.

Dans le cas de la conciliation et des conséquences des ajustements législatifs pris pendant cette période de crise, l’article L. 611-4 du code de commerce dispose : « Il est institué, devant le tribunal de commerce, une procédure de conciliation dont peuvent bénéficier les débiteurs exerçant une activité commerciale ou artisanale qui éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible, et ne se trouvent pas en cessation des paiements depuis plus de quarante-cinq jours. »

L’ouverture de la procédure de conciliation, qui est confidentielle, relève de la seule compétence du Président du tribunal de commerce (TC).

La conciliation est ouverte sur requête du débiteur. C’est donc bien l’action positive initiale du dirigeant qui doit permettre d’ouvrir, sous le filtre du Président du TC, cette procédure. Si ce dernier estime la demande du débiteur bien fondée, le Président du TC rend une ordonnance désignant un conciliateur en fixant sa mission. Sa durée ne peut excéder quatre mois, plus un mois supplémentaire sur requête du conciliateur.

Rappelons que la conciliation doit permettre à l’auxiliaire de justice, nommé pour une mission contractuelle de négociation avec les principaux créanciers de la société, de trouver une solution amiable afin d’étaler un passif devenu trop lourd pour l’entreprise. Le but étant d’éloigner le spectre de l’ECP en décalant l’exigibilité du passif.

Nicolas Yakoubowitch, Associé chez Exponens