Abdelkader Hamida, avocat associé chez Vaughan Avocats : "Il n’y a ni précipitation, ni brutalité dans la réforme du RSI"

Interviews
Outils
TAILLE DU TEXTE

Abdelkader HamidaLa suppression du régime social des indépendants (RSI) promise par Emmanuel Macron, a été confirmée le 5 septembre dernier par le Premier Ministre Edouard Philippe. M. Abdelkader Hamida, avocat associé chez Vaughan Avocats, a accepté de répondre aux questions du Monde du Chiffre sur ce sujet particulièrement sensible afin d’apporter un éclairage d’expert.

Pouvez-vous nous préciser ce que va changer concrètement cette réforme du RSI pour les travailleurs indépendants ?

Si l’on s’en tient aux déclarations du Premier Ministre le 5 septembre 2017 lorsqu’il a présenté son plan en faveur des indépendants, le RSI serait « adossé » au régime général de la Sécurité sociale dès le 1er janvier 2018 (avec une période transitoire de 2 ans), ce qui signifie que le régime des indépendants continuera d’exister mais la gestion sera assurée par le régime général. 

En d’autres termes, il n’y aura donc pas d’uniformisation des cotisations, ni des prestations entre les salariés et les indépendants. Par conséquent, les indépendants ne bénéficieront pas des prestations du régime général. Cette réforme vise à créer une sorte de guichet unique, que l’on soit salarié ou travailleur indépendant.

Comment va se dérouler la suppression du RSI ? Selon quel calendrier ? La date annoncée du 1er janvier 2018 pour entamer la réforme n’est-elle pas un peu précipitée ?

La suppression du RSI ne fait pas partie de la loi d’habilitation votée en juillet. Par conséquent, la réforme ne sera pas effectuée par voie d’ordonnance. C’est une loi qui actera la fin du RSI. Il faut donc prévoir le temps du débat parlementaire afin d’aboutir à une loi d’ici la fin de l’année.

Ensuite, le Premier Ministre a annoncé une période transitoire de deux ans pour procéder à l’absorption des caisses du RSI par les caisses du régime général. Pendant ces deux années, on peut imaginer que des discussions vont s’engager entre le RSI, le régime général et l’Etat pour accompagner cette absorption, notamment en ce qui concerne le sort des salariés du RSI.

Une chose est sûre, le régime général n’a pas vocation à absorber les éventuelles dettes ou crédits du RSI parce qu’il s’agit d’une « simple » gestion pour compte. Dès lors, il n’y a ni précipitation, ni brutalité dans la réforme. 

A ce stade, il faut se méfier des effets d’annonce ; en revanche, on peut se demander si, sur le long terme, cette mesure n’est pas annonciatrice de la création d’un régime unique de Sécurité sociale, quel que soit son statut (salarié, indépendant, étudiant, etc.).

La suppression du RSI est un sujet très polémique. Cette institution est largement décriée mais compte également ses défenseurs. Cette réforme est-elle opportune selon vous ?

La réforme est par nature source de polémiques : les progressistes sont contestés par les conservateurs. De mon point de vue, cette réforme annoncée participe d’une transformation d’ensemble de notre système de protection sociale. 

En France, nous avons construit le système de sécurité sociale autour du travailleur, ce qui suppose que le financement se fasse par la rémunération du travail. C’est pourquoi nous avons cette séparation entre travailleurs salariés (relevant du régime général) et travailleur indépendant (relevant du régime des indépendants).

Le Gouvernement semble avoir engagé un mouvement de réformes qui visent à repenser notre système de protection sociale pour le sortir de sa construction historique. L’augmentation de la CSG et la réduction des cotisations sociales sur les salaires participent de ce mouvement, comme la réforme annoncée du système d’assurance chômage en l’ouvrant aux indépendants.

Propos recueillis par Hugues Robert

Les Annuaires du Monde du Chiffre